Article publié dans le magazine Créola Octobre 2024
Dans le monde de la consommation nous sommes de plus en plus nombreux à nous soucier
du contenu de nos achats.
Pour la planète, pour soutenir les commerce de proximité mais aussi et surtout pour avoir
des pièces et des produits uniques qui épousent notre personnalité et nos besoins, les
produits locaux ont le vent en poupes !
1- Qui êtes-vous ?
Je suis Martiniquaise et Guyanaise. J’ai vécu les premières années de ma vie en Guyane
jusqu’à mes 18 ans après mon BEP métiers de la mode au lycée Melkior Garré. Je suis
ensuite partie en France hexagonale pour continuer mes études pour enfin travailler dans le
milieu de la haute couture que je n’ai jamais quitter… me menant jusqu’aux portes de la
cérémonie d’ouverture des JO de Paris. La Mode a toujours été ma passion et c’est un des
nombreux métiers que j’ai toujours voulu faire, car pour moi il n’y a pas qu’une seule voie à
suivre et je ne me voyais pas rester dans une seule boîte pendant 40 ans en ayant fait une
croix sur toutes mes autres passions.
2- Dans un secteur ultra concurrentiel est-il possible de s’épanouir ?
Je trouve mon épanouissement à travers cet art, la haute couture ! Dans un drapé, dans les
couleurs, dans les formes, dans la minutie, dans la finesse, dans l’originalité, dans la création.
C’est là que je trouve mon épanouissement donc tant que j’ai la possibilité, de voir et de
travailler à faire de belles choses, je suis totalement épanouie. Maintenant c’est vrai qu’il y a
de la concurrence, mais il y a de la place pour tout le monde sous le soleil. Chaque personne
peut s’exprimer et trouvera forcément une personne au moins qui appréciera son langage.
3- Qu’est ce qui anime l’envie de créer une marque sur nos îles ?
Je suis quelqu’un de créatif, j’ai toujours envie de créer plein de nouvelles choses.
En regardant toutes les créations qui se font déjà, je pense que j’ai eu envie de participer de
rajouter ma touche de fantaisie. J’avais envie de ramener ce qu’on m’a enseigner et y
intégrer une vision de la mode qui m’est chers. Des produits qualitatifs, des coupes haute
couture, ma vision des couleurs et de notre culture caribéenne.
La culture est tellement riche, je trouve qu’il y a encore beaucoup à dire et à faire en se
basant sur notre richesse culturelle.
Je dois ajouter que créer de l’emploi sur mon île est une motivation supplémentaire qui me
tient vraiment à cœur.
4- Quelle est, selon vous, la plus grande difficulté que peut rencontrer un créatif aux Antilles ?
Voici selon moi ce que nous sommes nombreux à rencontrer aux Antilles comme difficultés.
- Le manque d’infrastructures même s’il y a toujours moyen d’apprendre ailleurs et de
revenir diplôme en poche.
- L’argent : oui, cela peut être un vrai problème. Des demandes de financements sont
possibles mais restent souvent insuffisantes.
- Aux Antilles et partout ailleurs dans le monde : les pensées limitantes aussi bien personnel
que celle des autres !
« C’est trop difficile ! » « tu n’y arriveras pas ! » « ça existe déjà ! » « il faut de l’argent ! »
« Personne ne va acheter ça ! » « ça se fait pas comme ça ! » « l’entreprenariat c’est
dangereux ! »… bref, la liste est longue !
Juste ces petites réflexions là, dites par notre entourage, peuvent être un réel frein. Alors
qu’une personne qui croit en vous, va vous donner des ailes afin de vous envoler au-delà de
vos espérances.
5- Avez-vous un conseil pour ceux qui n’osent pas se lancer ?
Je suis perfectionniste et ce n’est pas toujours une qualité. Cela peut aussi être un frein qui
empêche de faire ce qui tient à cœur car ce ne sera jamais assez bien à nos yeux.
Le plus important est de démarrer : fais quelque chose fais-le avec les moyens que tu as sur
le moment. Ce ne sera pas parfait, mais tu vas t’améliorer !
J’ai imaginé mes premiers Maillot en 2009, j’ai un carnet qui déborde de croquis de Maillot
De Bain. C’est en 2021 que je me suis dit : « tu vas le regretter, tu n’auras rien fait et tu vas
t’en mordre les doigts. Alors bouge-toi pour toi-même ».
Je me suis lancé. J’ai traversé plusieurs obstacles en passant par la case dette et j’ai préparé
cette première collection. Dans l’avion en venant en Martinique, venant promouvoir ma
marque, je me suis dit « mais tu es folle, ça ne va plaire à personne! Pourquoi j’ai fait ça ? ».
Et puis, au fond de moi, un soulagement et une fierté d’avoir fait, ce qui me tenait à cœur, et
même si ça ne plaît pas, je suis allé au bout de mon idée .
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